L’artiste invité : Karine Dubernet
Karine Dubernet, c’est avant tout pour moi un coup de cœur que j’ai eu lorsque je l’ai découverte, il y a quelques années déjà, dans la pièce Bonjour Ivresse de Franck Le Hen. Depuis, je n’ai cessé de suivre sa carrière et de la voir sur scène dans ses 2 précédents one-woman-show.
Elle est actuellement à l’affiche du Point Virgule avec son nouveau spectacle intitulé Souris pas !. À cette occasion, elle a accepté très gentiment mon invitation pour parler un peu Drag Queen et un peu promo. Je vous laisse découvrir.
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Bonjour Karine,
Pour débuter, quel est ton rapport avec l’univers des Drag Queens ? Comment as-tu découvert cela et en connais-tu ?
D’abord, je suis une fan inconditionnelle de David Bowie depuis toute petite (époque Ziggy Stardust), sans doute est-ce avec lui que ma fascination pour les créatures a pris racine en moi. Je ne vais pas te mentir à Marignane (ville idéalement située entre un aéroport et une raffinerie, entre deux nationales) je n’avais pas beaucoup l’occasion de rencontrer des Drag, c’est à travers la musique ou le cinéma que j’ai continué à découvrir l’univers Drag. C’était d’abord le côté extravagant et outrageusement libre qui m’a plu. Des films comme « Priscilla folle du désert » de Stephan Elliott c’était un patch contre la déprime et la promesse de jours meilleurs quand je ne m’étais pas encore outée, que j’avais encore honte d’être ce que j’étais.
Puis j’ai commencé à sortir et j’ai commencé à rencontrer de vrais Drag en boîte gay à Marseille (le fameux New Cancan) et là un monde extraordinaire s’est ouvert à moi : ce qui est bizarre devenait la norme, ce qui était considéré comme indécent devenait beau, ce que la société considérait indigne devenait une fierté. Évidemment après c’est en devenant proche des garçons qui performaient que j’ai réalisé que derrière ces créatures superbes se cachaient presque toujours des histoires tristes. Tu me diras… on a tous une histoire triste qui nous colle au cul, les Drag le cache juste avec plus de panache !
As-tu déjà eu l’occasion d’assister à des spectacles de Drag ?
En effet, au New Cancan à Marseille j’ai assisté à quelques shows cultes mémorables. Juste avant la danse du tapis. Ah la province ! On sait s’amuser. Aujourd’hui, je vis dans le Marais et de temps en temps je vois passer quelques créatures, pas assez à mon goût, mais le quartier est devenu une galerie marchande pour millionnaires à mauvais goût hélas. Les bars gays sont remplacés par des boutiques de luxe et les glaciers. On veut moins de doudounes Montclerc et plus de Drag dans le Marais.
Aimerais-tu un jour être prise en main pour avoir une transformation pour le plaisir ?
J’adorerais ! Quelle comédienne ne voudrait pas ? Bon après, trouver des pompes à ma taille ça va être chaud : je chausse du 36, des pompes de Drag pour enfants ce n’est pas facile à chiner. Mais anytime anywhere je suis partante !
Pour parler de ton actualité, tu es à l’affiche de ton one-woman-show Souris Pas ! J’imagine que c’est une joie d’être de retour sur scène ? Le public est-il au rendez-vous ?
Je suis tellement heureuse de jouer à nouveau mon spectacle ! Tous les dimanches et lundis j’ai l’impression que c’est Noël, je me fais un cadeau et je fais un cadeau aux gens qui viennent. Et oui les gens viennent. Ils reviennent. Ils ne sont pas rebutés par les masques, les distances de sécurité et tout le tapage autour du Covid. Une fois que le spectacle démarre ils oublient tout ça et je les emmène dans mon univers et dans mon univers il n’y a pas de Covid.
C’est un spectacle que tu as co-écrit avec Carole Greep, comment s’est passé l’écriture à 4 mains ?
C’était génial parce que Carole et moi nous nous connaissons bien, c’est le deuxième spectacle que nous écrivons ensemble et maintenant on connait nos défauts et nos qualités, donc on se sert l’une de l’autre en toute amitié. C’est devenu tellement naturel d’écrire ensemble que je ne sais plus ce qui vient d’elle ou de moi. Nos deux paroles se mélangent. On écrira encore ensemble, je le sais.
Il est évoqué comme un spectacle autobiographique, sans trop en dévoiler pour ne pas casser le mystère, quelle est la part de vérité et de fantasmes ?
Alors je pars de ma naissance à aujourd’hui et tout ce que je raconte est vrai mais librement adapté. Par exemple ma poupée Barbie n’avait pas d’accent allemand dans la vraie vie.
C’est le 3e spectacle seule en scène, est-ce celui de la maturité ? 😉
Je crois que non parce que je resterais immature toute ma vie. Donc ce spectacle est le 3e spectacle de l’immaturité. Je suis pour ! Je revendique l’immaturité. Mon leitmotiv c’est de ne rien prendre au sérieux et surtout pas soi-même. Rire de tout. Avec bienveillance. Idéalement rire avec, pas de…
Pour t’avoir déjà vu plusieurs fois sur scène, tu es une boule d’énergie, est-ce que tu as un rituel ou un secret pour être en forme comme cela dès les premières minutes ?
Merci pour la boule 😉 ! Oui j’ai beaucoup d’énergie. Ma femme dirait « trop ». Le secret, c’est… non je ne peux rien dire. C’est peut-être ma femme le secret.
C’est Philippe Awat qui signe la mise en scène. Peux-tu nous parler du travail avec lui, et nous dire comment s’est fait la rencontre ? Car il a un travail théâtral assez loin du one-woman-show normalement.
Philippe Awat est un grand. Un maestro, un chef d’orchestre ! Je l’ai rencontré grâce à Carole Greep. Je ne le connaissais pas et tout de suite nous nous sommes aimés. Une évidence. Je lui ai lu le texte, il riait tout le temps, au début j’ai mis ça sur le compte de l’alcool mais il avait à peine touché son verre et le rire de Philippe c’est comme un feu d’artifice : c’est explosif, lumineux, ça te galvanise. A la fin il a dit « banco ». On a parlé de tout, de rien, on s’est reconnus pourtant on ne s’était jamais vus avant. Il fallait qu’on se croise donc. Et maintenant je ne veux plus travailler qu’avec lui en mise en scène. J’apprends beaucoup avec Philippe. Il a travaillé au cirque du Soleil avec Mnouchkine, dirigé le théâtre de Villejuif, … c’est aussi un comédien extraordinaire.
Philippe ne connaissait pas ce monde du one man. Il n’a eu aucun à priori. Après Shakespeare ou Brecht, il aurait pu manquer d’appétit à monter du Greep-Dubernet et bien non, Philippe est un gourmand. Il est gourmand des auteurs vivants, des comédiens, du théâtre. Je suis tellement heureuse de travailler avec lui. J’ai conscience de beaucoup utiliser l’adverbe « tellement » mais je suis également une grande fan de Céline Dion.
Pour terminer, sais-tu déjà combien de temps tu vas jouer ce spectacle sur Paris ? Et est-il prévu que tu ailles en Province si la situation le permet ?
Alors, je vais le jouer jusqu’à ce que je joue aux Folies Bergères et que ce soit complet sur 2 semaines, pas 3 c’est prétentieux. Puis après je vais tourner le spectacle en province dès que possible et aussi souvent que possible. Je veux rencontrer le public de province car il est très curieux et très généreux. Ah et il me tarde de jouer à Marseille ma ville d’origine. Bientôt j’espère. Déjà en novembre, je serai à Nantes à la Compagnie du Café-Théâtre. Et sinon au Point-Virgule jusqu’à fin décembre.
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Merci encore pour Karine pour sa disponibilité et sa bonne humeur. Vous pouvez la voir actuellement au Point Virgule les dimanches et lundis soirs à 21h15. N’hésitez pas à la suivre sur les réseaux et notamment son Instagram.
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